Les bénévoles du comité des fêtes veillent avec amour sur les crozets

Esserts-Blay

C’est l’histoire d’un saint patron. Autrefois rattachée à Saint-Paul-sur-Isère, Esserts-Blay devient la plus jeune commune des 7 paroisses de Notre-Dame-de-Basse-Tarentaise. En 1829, la chapelle dédiée à saint Sébastien et saint Fabien est choisie pour devenir l’église de la nouvelle communauté. Fière de son saint patron, la commune lui rend hommage tous les ans. Cette tradition est désormais assurée par le comité des fêtes.

Un lieu de rassemblement

historique

Le 20 janvier, jour de la Saint-Sébastien, la commune recevait la visite des 5 curés de la paroisse. C’était également l’occasion pour les habitants et ceux des alentours de profiter de festivités. Dans l’après-midi, se tenaient une ou plusieurs pièces de théâtre. Le soir, c’était l’heure du bal. Alors que beaucoup s’amusaient, d’autres côtoyaient l’événement pour parler affaires. Ainsi, les alpagistes réglaient leurs dûs aux ouvriers agricoles engagés pour la saison. Il faudrait ensuite attendre la Saint-Jean pour un nouveau bal.

Les traditionnels crozets se dégustaient en famille

Les crozets de sarrasin sont également une coutume ancestrale d’Esserts-Blay, mais elle ne se mariera à la Saint-Sébastien qu’en 2010. Originellement, chaque famille blaycheraine réalisait ses crozets de son côté à la période de la Saint-Sébastien. On s’invitait alors en famille ou entre amis et voisins pour les déguster. La fabrication en commun ne sera courante qu’après l’incorporation à la Saint-Sébastien.

Les crozets se joignent

à la fête

En 2010, la commune n’a plus de salle des fêtes. Il n’est donc plus possible d’organiser le bal. Qu’à cela ne tienne, l’idée est lancée de fabriquer les fameux crozets en groupe afin de proposer des bols à la dégustation, et ainsi, maintenir le lien social. Mais rien ne garantit que les habitués soient au rendez-vous, sans musique et sans danse. Malgré tous les a priori, l’initiative est saluée et l’affaire perdure.

Des granges au château

de La Aula

.

Dans un premier temps, les crozets sont préparés dans d’anciennes granges du village. À mettre la main à la pâte, de nouveaux outils de cuisine artisanaux voient le jour. Un pétrin est construit, et d’anciennes lames de faux sont réhabilitées pour former de grands couteaux plats. Précédemment fabriquée à la Cure, la préparation se déroule dorénavant en partie au château de La Aula, nouvelle salle des fêtes du village, où une trentaine de bénévoles pétrissent, étalent, découpent, font sécher et le jour « J », cuisinent plus de 80 kg des fameuses « pâtes de sarrasin ».

Des générations

qui ont du bol !

Plus de 300 bols ont été distribués sur la dernière édition de la Saint-Sébastien. Afin de préparer la première édition post-Covid, les bénévoles se coordonnent pour offrir à tous un fabuleux moment de retrouvailles. Toutes les générations sont présentes autour des tables. Les plus jeunes font jouer leur énergie dans la confection de la pâte sous le regard attentif et les conseils des plus anciens (Monique, Kiki, Beber, et Dédé). La tradition se transmet le sourire aux lèvres et les mains dans la farine.

La recette des crozets

500 g farine de sarrasin, 200 g de farine blanche, 150 g d’eau salée et 1 gros œuf frais, la recette est simple avec un nombre d’ingrédients tenant sur les 5 doigts, encore faut-il avoir le coup de main ! Une fois étalée, la pâte de 2 mm d’épaisseur est découpée en petits carrés qui seront mis à sécher 1 semaine. Reste alors la cuisson. À Esserts-Blay, il faut « que le beurre chante 3 fois et qu’ils (les crozets) soient tous attachés ». Il faudra donc les passer 3 fois au beurre et ajouter suffisamment de Beaufort pour que les petits carrés soient joints. Voilà un excellent moyen de faire la transition entre la galette des rois et la Chandeleur !

Le sarrasin,

plante de nos montagnes

Il n’y a pas de hasard à ce que le sarrasin entre dans la composition des crozets blaycherains. Auparavant, cette plante était cultivée sur les hauteurs du village, d’où son incorporation à la recette. Appelée « blé noir », elle ne fait pas partie de la famille des céréales pour autant, ni même une graminée. C’est une pseudo-céréale, poussant sur les terrains « pauvres » dont on fait volontiers de la farine. Dépourvue de gluten, elle est très digeste, mais cela complique son utilisation, seule dans la confection de pâtes ou de pâtes à pain. Elle est donc souvent mélangée à d’autres farines.

Estelle Martin Borret