Valserhône : quand de nombreux Italiens habitant à Bellegarde étaient dénaturalisés pendant la guerre

Bellegarde 1925  Construction d'un réservoir

Elle relevait de la seule volonté des nouvelles autorités, sans que rien n’eût été imposé par l’occupant nazi. Cette loi montre que le maréchal Pétain a utilisé le traumatisme de la Débâcle pour déployer une politique xénophobe, en réaction à la politique intégratrice de la IIIe République. Pour l’extrême droite, parvenue au pouvoir, il s’agissait de lutter contre l’Antifrance, qui aurait été protégée par la République pendant l’Entre-Deux-Guerres et qui aurait participé au déclin du pays, avant de le précipiter dans l’abîme.

Au total, entre 1940 et 1944, alors qu’un million de personnes tombaient sous le coup de la nouvelle loi, 114 000 enquêtes furent menées par l’administration et elles débouchèrent sur un peu plus de 15 000 dénaturalisations. Autant de personnes se sont donc retrouvées apatrides par la machine bureaucratique. Parmi eux, des personnes célèbres (Gainsbourg, Pérec, Schagall) et surtout 7 000 Juifs, soit 40 %.

Les Italiens : première communauté étrangère de Bellegarde

Les recherches menées par Michel Blanc ont permis d’identifier d’autres Bellegardiens à qui la nationalité française avait été brutalement retirée. Parmi eux, un autre Suisse : Bruno Maggio, mécanicien né en 1910 à Lausanne. Il avait reçu la nationalité le 19 mars 1940 et la perdit en octobre 1943. Les autres noms retrouvés sont tous ceux d’anciens immigrés italiens.

Une vengeance contre Mussolini

Les Italiens formaient en effet la première communauté étrangère de la ville. Ils avaient été déjà visés par une manifestation xénophobe, en juin 1940, lorsque Mussolini envoya son armée attaquer dans les Alpes après le début réussi de l’offensive allemande.

Les personnes concernées avaient été naturalisées récemment et étaient donc soupçonnées de ne pas s’être assimilées. Sébastien Sciamanna (ouvrier né en 1895 à Cagil) avait été naturalisé en 1937. Fernando Gori (manœuvre né en 1895), sa femme Annonciata Betini, ainsi que ses enfants Marius (né en 1922) et Marcelle (née en 1927) avaient été naturalisés en 1933. Le cas d’Antoine Zanga, maçon né en 1898 à Vall’Alta et qui avait été naturalisé en octobre 1930, est très intéressant. Il a perdu sa nationalité le 7 juillet 1941. Le texte stipule qu’il était alors interné au camp de Saint-Germain-les-Belles en Haute-Vienne. Cela laisse à penser qu’il était en détention à cause de son appartenance au parti communiste, alors interdit et pourchassé.

Louis Perrin, un résistant communiste dont nous avons parlé ici en 2022, avait également été interné dans un camp de Haute-Vienne.