Aiton : une mèche dans les fesses, un grain dans la tête

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Un trou noir. Christopher ne se souvient pas d’avoir frappé le surveillant. Pas plus qu’il n’a en tête les insultes proférées à l’attention de l’infirmière. Interpellant la victime, il s’excuse en s’étonnant « Il est gentil, je l’aime bien ». Puis se justifie, «  C’est à cause des neuroleptiques, ils me bousillent la santé. J’exige un suivi psychologique, pas une prise en charge psychiatrique ! »

« On m’a mis une mèche dans les fesses pour pouvoir m’écouter »

Le prévenu est bavard et la juge Laetitia Bourachot doit faire preuve d’autorité pour prendre la parole : « Votre bilan psychiatrique fait état d’une schizophrénie et d’une déficience intellectuelle légère. Vous réagissez par la violence à la frustration et au stress  ». « Ce sont des menteurs, s’exclame Christopher, je ne délire pas ! Ils m’ont mis une mèche dans les fesses où on entend ce que je pense dans toute la France ».

Dans la salle, les yeux s’écarquillent… l’homme poursuit, très sérieusement : « Je suis dans le grand-banditisme, dans ma famille à Marseille, il y a des gardiens, des enquêteurs et Jul. Depuis l’âge de 18 ans je suis marié à la juge d’instruction du tribunal de Chambéry ! » Stoïque, la magistrate remarque subtilement qu’il n’est pas marié et aborde son casier judiciaire, soit 21 mentions depuis 2012 pour violences, menaces, outrages et autres joyeusetés… «  Je suis bien en détention, s’enflamme Christopher, je ne veux pas aller en unité psychiatrique ! »

Invité à témoigner, le gardien victime du coup de poing évoque le caractère virulent du détenu : « J’ai essayé de le canaliser, mais je n’y suis pas parvenu. En six ans de métier, j’ai vécu bien des disputes, mais c’est la première fois que l’on me frappe. C’est choquant de prendre un coup juste pour une histoire de cigarette ». Au demeurant, il remarque… « Il joue la victime ».

Le procureur Jean Ailhaud, regrette ces audiences de plus en plus fréquentes où comparaissent des prévenus pour violences sur personnes détentrices de l’autorité publique : « Ce coup de poing est inacceptable Le psychiatre a affirmé que son discernement était altéré, pas aboli : je demande 4 mois de prison avec mandat de dépôt ».

Maître Jakubiak-Gros, après avoir rappelé que son client avait déjà été puni de 30 jours de quartier disciplinaire, argumente : « Cet homme a envie de parler, il a besoin d’un psychologue, pas d’un traitement psychiatre qui ne le contient qu’un temps. Actuellement, il prépare sa sortie au mois de juin, signe d’une bonne santé mentale ».

Le jugement

Le tribunal a suivi les réquisitions du procureur et condamné Christopher a une peine de 4 mois de prison avec mandat de dépôt.