En arrivant devant l’usine de production du Groupe Routin, à la Motte-Servolex, une flopée d’odeurs nous arrive. Et pour cause, le célèbre sirupier savoyard réalise ici des centaines de sirops. Mais en cette fin novembre, c’est pour entrevoir le futur de l’entreprise que nous sommes sur le site. Routin inaugure son Drink Design Center 1883, un centre de formation dédié au mouvement du « Drink Design », lancé en mai dernier. « On part du principe qu’aujourd’hui, quand un consommateur entre dans un bar et qu’il veut boire un cocktail, il veut aussi vivre une expérience qui fait appel aux sens, explique Stéphanie Charvoz, la directrice marketing. L’idée derrière le Drink Design, c’est donc de créer des expériences boissons. »
Rien de tel pour comprendre l’idée que de tester. Routin a recruté une équipe de « drink designers » qui ont créé 7 expériences qui seront utilisées comme illustration du concept lors de la formation. La spécificité ? « Dans ce collectif, on a un barman, un barista, un chef, un comédien, un designer et un maître sirupier. Ils travaillent ensemble. Et dans le futur, on pourra peut-être avoir une équipe avec un illustrateur ou un musicien », ajoute Stéphanie Charvoz.
Objectif : apporter une ouverture d’esprit
Ce jour-là, le collectif propose une expérience « rouge » sous le signe des émotions, dans une ambiance feutrée et avec une musique de fond. La puissance arrive avec un sirop de framboise prisonnier dans des glaçons, sur lesquels on verse un mélange gin/agrumes. La colère est servie dans un verre hérissé de piques, comme un virus. On y verse une infusion d’ortie, muscat et sirop de piment. Enfin la passion prend la forme du sans alcool, avec un sirop d’hibiscus et une eau pétillante infusée. « Dans cette formation, on veut apporter l’ouverture d’esprit et l’échange, explique Matthias, l’un des membres du collectif. À partir d’un thème, d’une saveur ou d’une émotion, on crée une histoire. »
Dans ce nouveau centre de formation, Routin va donc accueillir des barmans déjà aguerris qui veulent se former au Drink Design pour assurer « la mixologie de demain » et « donner ses lettres de noblesses » au mouvement. Les premiers élèves arriveront en mars 2023 pour leur formation (intense) de 40 heures sur cinq jours. « Il y aura différents modules : associer à la nourriture, l’analyse sensorielle, le storytelling pour transformer un goût ou une émotion en une histoire, et l’art oratoire pour raconter cette histoire », précise Stéphanie Charvoz. À la fin de la formation, les élèves seront en mesure de « créer et proposer leur propre Drink Design ». Comme pour ses sirops, le Groupe Routin veut utiliser ce centre pour accroître son rayonnement mondial, puisque la formation sera disponible dans différents pays pour former le plus de monde possible à la méthode Routin.
1883 : naissance de Routin il y a quasi 140 ans
80 pays commercialisent les sirops Routin sous leur marque 1883
220 collaborateurs
85 millions de chiffre d’affaires
Tous les produits sont fabriqués dans l’usine de La Motte-Servolex
Le mélange des molécules pour obtenir le sirop est quasiment l’oeuvre d’un chimiste.
Le Groupe Routin travaille avec des maîtres sirupiers qui inventent de nouvelles saveurs de sirops chaque année, selon la demande ou les tendances. Mais pour créer ce sirop, l’artisan doit s’imprégner de tout un univers, et presque se transformer en chimiste. « Par exemple, si on veut créer un sirop au pain d’épices, on va déjà commencer par s’inspirer du parfum et de ce que ça nous évoque : Noël, les choses sucrées comme le miel, des couleurs chaudes… », explique Hélène Mirallès, maître sirupier qui fait aussi partie du collectif de Drink Design.
L’assemblage aromatique
Place ensuite au « décryptage ». En sentant et goûtant des pains d’épices, les sirupiers analysent les ingrédients qu’ils vont devoir utiliser pour retrouver ce goût typique. Il faut avoir le nez assez aiguisé pour reconnaître les molécules : les notes d’anis, de cannelle, un côté boisé ou cuit… Le processus pour créer un nouveau sirop peut alors durer plusieurs semaines, voire plusieurs mois.
Le sirupier devient donc parfumeur... avant de prendre son tablier de chimiste pour effectuer ses mélanges. « Notre métier, c’est l’assemblage aromatique », ajoute Hélène Mirallès. Une fois les molécules et les éléments définis, une recette est établie pour connaître précisément les quantités nécessaires à la fabrication du sirop. Résultat, Routin, qui est parti dans les années 1980 des sirops classiques type fraise et menthe, a aujourd’hui 170 recettes différentes.