Une étrange affaire
Le 23 août 2022, une femme de 77 ans est admise au CHU de Dijon, pour subir une opération suite à une fracture de la jambe. Elle est alors inscrite sur la liste d’attente des interventions chirurgicales, l’établissement est à l’époque en manque de personnel. Dans sa chambre d’hôpital, elle patientera plusieurs jours, maintenue plusieurs fois à jeun en prévision de l’acte chirurgical. Qu’elle ne connaîtra pas. Cette dame décédera à l’hôpital avant d’avoir été traitée.
Pour quelles raisons ? Tout est dans cette question pour cette affaire qui fait sensation depuis qu’elle a été révélée par le journal Le Bien Public, début novembre.
La détresse familiale
La famille a porté plainte contre l’établissement hospitalier, parce que, selon elle, leur parente serait morte de faim faute d’avoir été alimentée durant toutes les journées où elle a attendu l’opération. Toujours selon la famille, elle n’aurait eu qu’un bouillon de légumes, le 24 août au soir. « C’est la seule nourriture qu’elle aura eu jusqu’à sa mort le 31 août », affirme-t-elle au micro de BFMTV. « Ils lui ont dit «non, vous devez être à jeun, vous allez être opérée demain». Et ça pendant plusieurs jours. » La fille de la victime affirme même : « Sur la porte de sa chambre, il y avait le tableau «à jeun», continuellement ». Une famille en détresse face à un service qui, dit-elle ne les informe pas de ce qui se passe. « Je leur ai demandé ce qu’il s’est passé [avant son admission en réanimation]. Ils n’ont jamais pu nous le dire », témoigne-elle toujours à l’antenne de BFMTV. Une autopsie de la défunte a été effectuée début septembre, avant l’incinération du corps, les résultats ne lui ont pas plus été communiqués.
La réaction du centre hospitalier dijonnais
Dans un premier temps, le CHU de Dijon n’a pas souhaité s’exprimer sur l’affaire, mais devant l’ampleur prise par cette dernière, la direction de l’établissement a répondu lors d’une conférence de presse, ce mardi 8 novembre 2022. Indiquant, rapporte Le Bien Public : « Cette patiente a été prise en charge le 23 août dernier pour être opérée d’une fracture du fémur. Afin de garantir la sécurité des patients, toute prise en charge au sein du bloc opératoire nécessite d’être sécurisée par la présence d’un nombre suffisant de professionnels de santé qualifiés. Dans ce contexte, les opérations urgentes sont prioritaires et l’opération de cette patiente a été reportée à plusieurs reprises ». Et aussi : « Pour chaque intervention programmée en orthopédie, un protocole médical précis est appliqué et une période de jeûne de 6 heures concernant l’alimentation solide et de 2 heures concernant l’alimentation liquide est prescrite avant l’opération. Lors de chaque report, des repas ont été commandés et délivrés auprès de cette patiente. Ils ont fait l’objet d’une traçabilité dans son dossier ».
Tenu au secret médical et dans l’attente des résultats de l’autopsie, l’établissement n’a pas pu apporter à la famille, de précisions concernant les circonstances de la mort. Réitérant simplement : « Si elle a bien été maintenue à jeun plusieurs jours successifs, (…) cela a été contrôlé. Après chaque report successif, des repas ont été commandés, des repas ont été distribués et ces faits ont été tracés dans le dossier ». Le CHU s’est mis à la disposition de l’enquête ouverte par le parquet de Dijon, qui : « doit nous permettre collectivement de comprendre ce qui a conduit au ressenti de cette famille et à l’évolution de la situation de la prise en charge de la famille. C’est un dossier médical complexe qui nécessite un regard expert ». Il se dit aussi à la disposition de la famille pour l’accompagner.