Ste-Foy-Tarentaise : le Louvre a Mona Lisa, la Tarentaise le Monal

L’inconvénient avec Christian, c’est qu’il vient des Côtes d’Armor et que, sorti de son océan et de ses côtes déchirées, il n’existe rien de plus beau au monde. « Et puis au moins, pour aller à la plage, il ne faut pas marcher trois heures ». Nul endroit en Savoie ne trouve grâce à ses yeux et quand on s’en agace, il rétorque avec un petit sourire malicieux « tu comprends, rien ne peut égaler un coucher de soleil sur la pointe de Bihit ». Ok mon gars, en choisissant comme destination le Monal, on tire une dernière cartouche : s’il ne craque pas sur ce petit hameau cerclé d’étangs, de ruisseaux, de rochers et de forêts, la cause est désespérée La destination, perchée à 1875m se mérite et au départ d’Albertville, il faut compter une petite heure et demi de trajet. Plutôt que de bifurquer juste après la station de Sainte-Foy, on poursuit en direction du barrage de Tignes pour tourner au second panneau indicateur, avant le premier paravalanche qui ponctue la route. Après quelques lacets, on abandonne la voiture sur un parking et en route pour 45 minutes de marche.

Partout où se pose le regard, il y a de belles choses à voir !
Partout où se pose le regard, il y a de belles choses à voir !

Un peu essoufflés, vraiment époustouflés…

Face aux glaciers du Mont Pourri, les décors sont somptueux. On laisse derrière nous deux petits hameaux d’où s’échappent les premières fumées de l’automne, on traverse un vaste pré avant de longer un mur d’escalade où quelques acrobates domptent d’impressionnantes verticalités. Nos Bretons s’arrêtent, un peu essoufflés, un peu époustouflés Allez, un dernier effort et se révèle enfin le Monal. Il est cinq heures de l’après-midi, en hors-saison, et personne à l’horizon, personne dans les maisons. Quartier libre. Chacun vaque à ses photos, des petites pièces d’eau aux chalets de pierre et de bois qui sont l’adorable prolongement de leur environnement. Les rochers ne sont pas aussi impressionnants que ceux de la côte de Granit Rose, mais ils constituent pour les enfants un joli terrain de jeu. Au bout de quelques minutes, les pas portent naturellement la petite expédition au torrent qui lèche le village.

L’herbe est rase, le soleil, quand il ne joue pas avec les nuages, plonge ses rayons délicieux sur des organismes alanguis. Christian balaie l’horizon et lâche laconiquement « ouais, c’est pas mal ». Dans sa bouche de chauvin, qu’un lieu autre que breton soit qualifié de pas mal est un exploit. Avec un petit sourire de vainqueur, on déplie la nappe, sort le saucisson, le beaufort et le blanc. Il est un peu tôt pour l’apéro, qu’importe, il faut transformer l’essai, ajouter de la gourmandise à la beauté. Balayer le décor, fermer les yeux et savourer. Un petit vent frais s’est réveillé et le soleil de nouveau dissimulé derrière les nuages. On sonne l’heure du repli en même temps que tintinnabule un concert de clochettes sur les hauteurs du Monal. Défiant la pente, un troupeau de chèvres descend à toute vitesse. C’est simple, mais magique. Dans la voiture qui nous ramène sur Albertville, Christian est presque ému «  j’avoue, c’était beau. Il manquait juste le coucher de soleil pour arriver à la hauteur de la pointe de Bihit.»

Il a craqué, comme on craque à chaque fois que l’on va s’y ressourcer. Et comme vous si vous n’y êtes jamais allés !