Chahinez Daoud, 31 ans, mère de trois enfants, est morte le 4 mai 2021 à Mérignac (Gironde), après avoir été blessée par balles par son mari violent dont elle était séparée. Il l’avait ensuite immolée par le feu dans la rue. Ce drame a provoqué une mission conjointe de l’inspection générale de l’administration et de l’inspection générale de la justice.
Chahinez Daoud avait déposé une première plainte le 7 août 2020 contre son conjoint l’accusant de la harceler par des appels téléphoniques répétés alors qu’il était incarcéré et avait interdiction de la contacter. Mounir Boutaa avait été condamné pour des violences en récidive sur sa femme à 18 mois de prison, dont neuf de prison ferme, le 25 juin 2020, par le tribunal correctionnel de Bordeaux.
Le 15 mars 2021, la mère de famille était allée porter plainte au commissariat pour dénoncer une nouvelle agression de son conjoint, sorti de prison en décembre 2020, en expliquant qu’il l’avait frappée et avait tenté de l’étrangler. Moins de deux mois plus tard, elle se fait tuer. Mounir Boutaa est mis en examen pour homicide volontaire.
Défaillances sur toute la ligne
Dans son rapport, la mission d’inspection souligne que « la grille d’évaluation du danger et la fiche d’évaluation des victimes » ont effectivement été remplies, puis transmises par le policier au parquet, mais selon elle « il existe un doute sérieux sur le soin avec lequel ces grilles ont été renseignées ».
Le policier qui avait recueilli le 15 mars la plainte de Chahinez Daoud contre son mari violent venait d’être condamné pour « violences intrafamiliales », a expliqué le parquet de Bordeaux, cité par franceinfo, confirmant une information du Canard Enchaîné.
« Nous avons été informés le 24 juin par le juge d’application des peines de Bordeaux qu’un des fonctionnaires ayant pris la plainte du 15 mars 2021 de Chahinez Daoud avait lui-même fait l’objet d’une condamnation pour violences intrafamiliales », a indiqué le parquet.
Le tribunal correctionnel de Bordeaux l’avait condamné le 10 février à une peine de 8 mois de prison avec sursis probatoire et non-inscription de cette condamnation au casier judiciaire B2, selon le parquet. Le bulletin nº2 du casier judiciaire est accessible aux administrations publiques de l’État saisies de demandes d’emplois publics, de demandes d’agrément, etc. Le bulletin B2 présente ainsi une importance dans l’accès à certaines professions réglementées (médecins, taxis, emplois de la fonction publique, éducation nationale, animation…). Le policier « a reconnu les faits, précisant être suivi par un addictologue » et a été condamné pour « violences habituelles sur son ex-conjointe », écrit le Canard Enchaîné.
Jointe par l’AFP, la police nationale précise qu’« une enquête administrative avait été ouverte dès que l’épouse du policier avait déposé plainte ». À la suite de cette enquête, le fonctionnaire a fait l’objet d’une « demande de renvoi devant un conseil de discipline », « qui ne s’est pas encore tenu », précise la police nationale. Selon le Canard Enchaîné, sa hiérarchie était « parfaitement au courant », l’un de ses chefs reconnaissant que « son affectation au bureau des plaintes «était discutable» ».
Le gouvernement a annoncé le 10 juin de nouvelles mesures, à la suite du rapport de cette mission, mettant en lumière une série de défaillances dans le suivi du conjoint violent multirécidiviste qui ne portait pas de bracelet anti-rapprochement, et la protection de la victime, qui n’avait pas de téléphone grand danger, selon son avocate citée par France 3.
Gérald Darmanin a promis ce jeudi 22 juillet de transmettre ce rapport et de prendre toutes les sanctions « qui s’imposent à tous les niveaux de la chaîne de responsabilité ».
Chantage, humiliation, injures, coups… Les femmes victimes de violences conjugales peuvent contacter le 3919. Gratuit et anonyme, ce numéro de téléphone est accessible 24h/24 du lundi au vendredi, et les samedi et dimanche de 9h à 18h. En cas d’urgence, il faut composer le 17. Vous pouvez aussi envoyer un SMS gratuitement au 114.